Résumé : |
Inculquer une formation, c’est ajouter un savoir-faire à un savoir, pour donner la capacité d’agir. Cela exige une véritable stratégie pédagogique, définissant les connaissances à fournir et de quelle façon les enseigner pour atteindre cet objectif. En ce qui concerne la formation à l’électrochimie, l’exposé commence par un rappel du domaine à englober dans cette formation et de son contenu théorique. Le traitement théorique des phénomènes électrochimiques fait appel à des concepts et à des traitements de base de plusieurs disciplines fondamentales : thermodynamique, cinétique chimique, hydrodynamique, voire mécanique quantique et physique du solide, et bien entendu électrostatique et électrodynamique. Les caractéristiques courant "potentiel d’électrode" caractérisant chaque système électrochimique constituent en fait le pivot de l’étude de l’électrochimie : d’un côté, leur analyse en s’appuyant sur la théorie apporte la connaissance des processus mis en jeu ; de l’autre, ces caractéristiques expérimentales ou construites théoriquement permettent la prévision méthodique et la mise au point (par le choix des conditions de réalisation) des applications.
Celles-ci font l’objet d’un rapide tour d’horizon. L’électrolyse "forcée" est utilisée à des fins préparatives et à des fins de séparation et de purification, notamment le raffinage électrolytique des métaux. L’électrolyse "spontanée" permet à l’inverse de produire du courant grâce aux dispositifs appelés batteries. A côté de ces deux domaines d’exploitation typiques, un certain nombre d’autres secteurs de la science appliquée et de la technique exploitent les processus électrochimiques : les traitements de surface, l’usinage, l’affichage, la dépollution, etc. Le plus notable de ces secteurs est celui de la corrosion métallique, processus chimique d’oxydoréduction mais décomposable en deux processus électrochimiques de courant résultant nul. Dans les applications, une place spéciale doit encore être réservée à l’exploitation en analyse chimique. La polarographie inventée il y aura bientôt un siècle par J. Heyrovsky a marqué le départ à la fois de la chimie analytique moderne et de l’électrochimie moderne. A noter que, dans toutes les applications, l’intervention de réactions chimiques en solution (acidobasicité, complexation, insolubilisation ou solubilisation) apparaît comme un facteur d’action capital, et que le savoir-faire de l’électrochimiste comprend, autant que la maîtrise des processus aux électrodes, celle de ce moyen d’action aux possibilités quasi infinies.
La question de la formation à l’électrochimie est ensuite abordée en préconisant de suivre la démarche que Prigogine et Stengers ont appelée "le dialogue expérimental". Le premier objectif est de comprendre, par l’analyse des caractéristiques courant-potentiel d’électrode à l’aide du traitement théorique des diverses composantes du processus, permettant de dégager les divers facteurs d’influence. Prévoir les modifications qui peuvent être imposées en agissant sur ces derniers fait aborder le second volet de la stratégie de formation : apprendre à agir. Enfin, au-delà de cet objectif que constitue la maîtrise des caractéristiques courant-potentiel des systèmes électrochimiques, apprendre à agir, c’est aussi naturellement apprendre à s’en servir en vue des applications.
Pour conclure, la dernière question envisagée est la suivante : quel intérêt cette formation à l’électrochimie peut-elle présenter dans le cadre d’une formation scientifique générale ? Si une place notable voire essentielle dans la formation scientifique doit être ménagée à l’électrochimie, c’est principalement en tant que formation d’esprit, consistant en une aptitude à aborder les problèmes pratiques et à les résoudre au moyen du raisonnement analytique. |